Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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rèvé de hautes destinées. L’un s'était eru grand capitaine appelé à commander les armées ; l’autre eut voulu diriger la politique des peuples. Ils étaient faits pour se comprendre, et ils firent ensemble, comme dit SainteBeuve, « leur dernier rève d'imagination. » Aussi devons-nous nous montrer circonspect quand le Prince de Ligne nous dit de son ami qu'il était un homme d'Etat en même femps qu'un homme du monde. Réduisons l'éloge à de plus justes proportions. Un mot résume bien l’idée que l’on doitse faire de Sénac de Meilhan : il fut un homme de cour. Le comte de Roumiantsof ne pensera guère autrement quand il dira que Sénac de Meilhan était « un bel esprit» mais non «un bon esprit.»

C’est cet homme de cour qui après avoir émigré en 1791 à Aïx-la-Chapelle, puis à Brunswick, alla ensuite en Russie et fut reçu par Catherine IL Il y alla avec l'idée d'écrire l’histoire du règne de l'Impératrice. Par les lettres que lui adressa la souveraine, nous allons voir comment ce projet naquit et comment il fut conduit; nous verrons aussi l'accueil que Catherine II fit à Sénac de Meilhan, l'impression qu’il lui produisit et les conséquences qui s’ensuivirent.

L'histoire de ce voyage de Sénac de Meilhan à Pétersbourg,qu'il nous sera facile de reconstituer,ne nous permettra pas seulement de mieux connaître lecaractèreambitieux et versatile de Sénac de Meilhan ; elle nous permettra surtout d'apprécier l'attitude de l’Impératrice à l'égard d’un Français de marque au moment où celle-ci s’élevait le plus contre la France révolutionnaire, et elle sera pour nous un complément de précieuses informations sur la pensée de Catherine vis-à-vis de la Révo-