Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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l'âme républicaine, n'avait jamais eu commeLouis XIV ou d’autres autocrates, des dispositions marquées à dicter ses volontés à desscribes historiographes : mais en 1790 les idées libérales des premières années de son règne ont fait place à des idées autoritaires, et ilne s’agit plus d’une œuvre simplement littéraire et morale 3 il s'agit d’une œuvre historique et philosophique qui doit constituer un monument élevé à la mémoire de son peuple et lui servir de modèle dans l'avenir. Or, Catherine, qui jadis a paru écouter les beaux projets de Diderot, ne veut pas que la Russie soit conseillée par le caprice d'un étranger utopiste; elle veut que la Russie reste Ce qu'elle est, marchant dans la voie qu'elle s’est tracée ; pour cela, la souveraine s’entoure de toutes les sauvegardes, exigeant que son historiographe s’assimile la Russie du dix-huitième siècle comme celle des premiers Tsars.

Aussi Catherine témoigne-t-ellé peu d'enthousiasme pour cette histoire de son règne. Elle dit à M. de Mordwinof : « Si Sénac de Meïlhan persiste dans son projet, » ce qui signifie presque : j'aimerais autant qu'il y renonçât.

Le moment devait arriver cependant où Catherine II ne pourrait point éviter de correspondre avec Sénac de Meilhan. Dans une nouvelle lettre, datée du 16 février 1791, et que M. de Mordwinof avait également fait parvenir à Pétersbourg, Sénac de Meilhan demandait à l’Impératrice un petit inot, afin de savoir sous quel aspect elle désirait que son voyage fût envisagé, de manière à ne pas éveiller la curiosité du monde diplomati-