Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

LES ÉVÉNEMENTS 83

bout de quelques mois, les mécontentements éclatèrent. Les propriétaires furent hantés du spectre de l'affranchissement, habilement évoqué de loin par les colons résidant en France : les blanes non propriétaires ne tardèrent pas à remarquer que les agents du roi, civils et militaires, étaient des aristocrates, ennemis de la Révolution; les noirs et mulâtres désespérèrent de voir appliquer aux colonies la Déclaration des Droits de

l'homme.

Une lettre adressée, le 1% décembre 1789, à l'hôtel Massiac par un colon de Saint-Domingue, rend bien compte de l’état de malaise qui régnait dans l'île : « Nous avons, y est-il dit, établi des Comités dans les districts ; nous avons des électeurs à Port-au-Prince pour tâcher d'établir un comité colonial et faire porter toutes nos doléances à l'Assemblée coloniale de ce chef-lieu. Mais il n'y a pas d'harmonie ; l'intérèl particulier s'élève contre l'intérêt général, le Nord contre l'Ouest et le Midi... Au Petit-Goave, Ferrand de Baudière, ancien sénéchal de cette juridiction, a élé tué comme convaincu d'avoir voulu donner des moyens aux gens de couleur. À Petite-Rivière, un notaire a failli être tué pour avoir libellé une requête pour les gens de couleur, où ils demandaient l'égalité civile et politique... Nous tâchons d'empêcher les mauvais petits blancs, qui se sont

en France de 1777 à 1790) rendaient à peu près vaines les méticuleuses et honteuses précautions que l'on prenait. — V. Peytraud, l'Esclivage aux Antilles françaises, p. 394, et tout le chapitre vu du livre LI.