Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

178 CORRESPONDANCE DE THOMAS LINDET

département (1) ne puisse pas l'être d’un autre département : nous ne tarderons pas à avoir un lieutenant général du royaume.

Le roi est revenu de Saint-Cloud. Il s'était proposé de fréquentes apparitions pour accoutumer les Parisiens à son absence : je ne sais s’il retournera. On a essayé de répandre des semences de discordes : on a dit que SaintCloud n'étant pas du département de Paris, la garde de Versailles ou même celle de Saint-Cloud et de Sèvres devaient avoir tous les postes, et la garde de Paris étreire gardée comme étrangère. Mais les Parisiens se regardent comme les gardes du corps du roi-bourgeoïis de la capitale.

Au moment de l’arrivée à Saint-Cloud, des chambres avaient été marquées pour les officiers Suisses, on n’en avait pas marqué pour les officiers des gardes nationales. Le lendemain, on refusa l'entrée des appartements aux officiers de la garde nationale, on l'accorda à un officier de dragons. M°° Élisabeth voulut aller à Saint-Cyr. L'officier de la garde nationale demanda son cheval; on ne lui en avait pas préparé : il alla aux écuries en faire seller un, et pendant ce temps M*° Élisabeth partit.

Pendant le jour on entendit crier: Aw secours! la garde nationale assassine Le roi! Le cri fut répété la nuit: il paraît qu'on avait envie de se défaire de la garde parisienne et de la dégoûter, ou bien ceux qui répandent ces bruits ont envie de dégoûter la Cour des voyages. Je crois que ces derniers réussiront.

On ne voit pas ces voyages sans inquiétude. Le grand nombre d’aristocrates commence à se convaincre qu'il est impossible de susciter une guerre civile, que ce ne serait tout au plus qu'un massacre des malintentionnés dans lequel plusieurs gens tranquilles seraient enveloppés ; : cependant il existe des gens si furieux, si imprudents, qu'on ne sait ce qu'ils oseraient.

(1) Décret du 8, défendant qu'il y ait un commandement de gardes nationales dans plus d'un département.