Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (3 JUILLET 1790) 197

entre les mains de quelques individus, que les autres surveilleront, sans comprendre leurs opérations et sans avoir le temps de les examiner. A quels risques la chose publique va être exposée! Et votre assemblée de district va suivre les mêmes errements. Vos électeurs croient-ils que quelques laboureurs et quelques marchands, qui sont dans l’Assemblée nationale, y aient beaucoup opéré ? qu'auraient-ils pu faire, s'ils n'avaient pas des guides et des conducteurs? Le bon sens et la probité sont des dispositions requises dans un administrateur; mais le bon sens et la probité ne suffisent point dans une grande administration, lorsque personne n’y porte des talents, des lumières, et une application laborieuse fortifiée par une longue habitude. Les bonnes intentions de ces honnêtes administrateurs peuvent faire bien plus de mal que les fureurs des Maury, des Cazalès, des Duval, des Faucigny, des Montlosier, des Foucauld, etc. Votre observation est très juste. Si la route était frayée, on irait machinalement au but, mais à quelles déviations ne seront pas exposés, même involontairement, des gens peu exercés? Ceux-mêmes qui ont construit l'édifice ont bien de la peine à en connaître les liaisons.

P.-S. — M. Gazan est ici, ainsi que plusieurs membres de l’administration : M. Buschey des Noës est leur correspondant, leur agent et le seul qui reçoit leur visite. Je me trompe, sans doute ils auront vu ceux que nous sommes accoutumés à ne pas compter. — Le procureur du roi d'Évreux va solliciter la place correspondante dans les nouveaux tribunaux.

L'Assemblée est fatiguée des longues dissertations : bien des géns qui ont vu que, par des mouvements brusques dirigés à propos, on a emporté de très bonnes lois, qui avaient été précédemment discutées, éclaircies, croient être devenus des oracles. Sans attendre l'impulsion, ils s’avisent de la donner : ils sont impatients,