Correspondance diplomatique de Talleyrand. La mission de Talleyrand à Londres, en 1792 : correspondance inédite de Talleyrand avec le département des affaires étrangéres le général Biron, etc.

78 MISSION DE TALLEYRAND

on peut entendre à travers une muraille, une conversation en langue étrangère. M. Dietrich est vif, chaud, patriote : il se croyait au moment de voir lAlsace attaquée et me parlait des intelligences qu’il avait en Allemagne et des dispositions des peuples à embrasser, en cas de guerre, la cause des François. J’oublie mille autres choses qu’il a pu me dire; mais l’écrivain allemand a écrit, a modifié et m'a prêté ce qu'il a voulu. Enfin, il a fait une pièce politique qui lui a valu quelque argent ou quelque faveur à Berlin, et ce dialogue sans doute infidèle a fait regarder comme réelles toutes les calomnies qui étaient venues de tous côtés.

La colère du Roï était montée à tel point, qu'il ne m'aurait pas reçu si ses ministres, de peur d’aigrir les affaires, ne lui en eussent pas remontré tous les inconvénients. Ainsi il résolut de me donner une audience, de me laisser traiter avec ses ministres, mais de me donner personnellement tous les désagréments qui dépendraient de lui, et vous sentez bien que toutes les personnes notées dans les fausses instructions évitèrent avec soin mon approche, de peur d’être perdues’. Vous jugerez facilement qu'ignorant toutes ces

1 La Gazelte universelle, numéro du 4 février 1792, dans sa correspondance de Berlin, du 24 janvier, donne un récit très détaillé de l'incident :

« M. de Séqur eut sa première audience du Roi le dimanche 14 janvier, jour où le roi de Prusse recoit les étrangers et le Corps diplomatique. Sa Majesté, après avoir recu le rapport dans la salle d'ordre, et causé avec les généraux qui y étaient assemblés, entra dans la salle des étrangers. Ordinairement le Roi ne parle qu'aux étrangers présentés du jour, et dit quelques mots à l’un ou l'autre

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