Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

266 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

Lerrre XXIII (OUVERTE). A Madame de Maisonneuve], à Glatz.

Neisse, le 18 février 1794.

Je suis vivement touché, Madame, de la marque de bonté que vous me donnez, et déjà j'avais à vous remercier de la note bien aimable qui adoucissait les sévérités de M..., mais les expressions de ma reconnaissance avaient été retenues par l'espoir de votre arrivée, et je ne me doutais pas alors qu’on s’occupât de me faire regretter les agréments de Magdebourg. De toutes les possibilités de la vie, ma séparation d'avec Monsieur votre frère m'avait toujours paru la moins probable; cette disposition, faite avec plus de discernement que de sensibilité, m’a effectivement rendu très malheureux; mais ce n’est pas un motif d'espérer que vous aurez réussi dans votre demande. On ne m’empéchera pas du moins de jouir iei du bonheur que vous aurez eu l’un et l’autre à vous revoir, et si je n'étais pas un peu gêné par les barricades de ma prison, mes trois sentinelles de jour, mes cinq sentinelles de nuit, ma grande et ma petite garde, et toutes les fortifications qui sont sur ma tête et autour de moi, vous me verriez bien vite auprès de vous, pour partager une société qui conviendrait tant à mon cœur. Je vous remercie des nouvelles que vous me donnez de ma famille, de ma malheureuse cousine, de son amie et de nos deux compagnons. Ces dernières me font d'autant plus de plaisir que j'en espère de futures améliorations dans leur sort, et que la santé de Lameth en a surtout grand besoin. La mienne, sans être suffisamment bonne au gré de