Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

CORRESPONDANCE INÉDITE 269

à moi. Je compte sur vous et sur M" de Maisonneuve pour donner de mes nouvelles à nos amis communs, et même pour envoyer à Londres et en Suisse les parties de mes lettres qu’on désirerait y recevoir; car outre que les personnages considérables qui me font l'honneur de me lire en passant doivent s’ennuyer de ces répétitions, il faut que j'attende, pour écrire à M° d'Hénin, qu'elle m'ait répondu, ce qui exige beaucoup de temps. La petite anecdote de Magdebourg est singulière; mais comme elle offre d'une part des procédés très honnêtes, de l’autre un empêchement qui ne l’est guère, nous n'avons pas le droit d'en être surpris. Je vais écrire un mot à nos compagnons de captivité.] Ne vous tourmentez pas, [mon cher ami], de l’insalubrité de Neisse, [dont Félix et Chavaniac se ressentent plus que moi]; ni de la petitesse de ma cour, dont l'été amènera le desséchement; ni de ma médecine pantomime, dont il sera comme du confesseur de Louis XV, qui pendant huit ans a été complètement sourd. Pourvu qu'on dise que j'avais un docteur, et que je fusse comme si je n’en avais pas, le tempérament décidera du reste, et si la mort attend à la grille de mon soupirail pour me happer, je vous promets, à moins qu'elle ne triche un peu, de la faire attendre longtemps. [Quant à mes études, plus urgentes encore que difficiles, j'ai déjà travaillé une grammaire qui serait suffisante]

J'ai été bien édifié, mon cher Maubourg, de la promotion du cardinal Maury‘; [mais] je ne vous parlerai ni des autres nouvelles des gazettes, ni surtout des

1. L'abbé Maury, député du clergé aux états généraux, était un des principaux orateurs monarchistes à la Constituante. Émigré en Italie en 1791, il devint évêque de Montefiascone, puis, en mars 1792, archevêque de Nicée

in parlibus; cardinal en 1794, et ambassadeur du comte de Provence (Louis XVIIT) auprès du pape (1799).