Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

358 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

Mon devoir, en sortant de prison, a été d’être prêt à tout sacrifier, hors mes principes, à la moindre chance de servir la liberté et mon pays, et à tout tenter pour que mes amis, chacun suivant ses espérances et son génie, ressentissent le moins possible l'inconvénient de m'avoir connu. Le système actuel, la malveillance personnelle et toutes les circonstances se réunissent pour prouver la vanité de ces illusions. Mais quoique je fusse plus loin que jamais de m'occuper de ma rentrée, j'aurais voulu que tous mes compagnons de départ, sans en excepter un seul, fussent rayés de la liste où je serais trop heureux d’être confirmé à ce prix. La femme de l’un d’eux vous verra, et je sais bien que si vous y pouvez quelque chose, vous le ferez. J'ai certifié avec autant de plaisir que de vérité qu’on ne doit rien lui attribuer de ce qui est allégué contre nous.

Jusqu'à présent, mon cher cœur, vous m'aviez fait espérer de revenir au mois de décembre; si vous avez lu ce que je mandais à Anastasie, vous aurez reconnu que mon désir d'aller au-devant de vous en Hollande est toujours le même, mais que le vague dans lequel était resté le ministre, les expressions attribuées à deux Directeurs français et le silence des puissances bataves me faisaient penser qu'à moins de quelques garanties de plus nous ne pouvions pas nous établir dans ce pays, même provisoirement. Ce que vous mandez à Georges change absolument la question, et puisque vous ne pouvez venir qu'en Hollande et au mois de février, car le doute dans ce moment n'annonce que trop une certitude, je m'y rendrai bien certainement de mon côté. L'idée d'appeler ici Anastasie et Charles ne peut guère avoir lieu avant ses couches ; la vente de Wittmold, la recher-