Discours de M. le général Cubières, pair de France, ancien ministre de la guerre, membre du Comité d'infanterie : recueillis et précédés d'une notice historique par un officier de l'ancienne armée

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Il n'est nul besoin de démonstrations mathématiques pour comprendre que le roulage à deux roues est Le plus destructif des chaussées. Chacun sait qu’une pression offense d'autant moins le plan surlequel elle s'exerce qu’elle agit sur un plus grand nombre de points à la fois. Eh bien, la charrette agit précisément au rebours; c’est de toutes les machines roulantes , celle dont l’effet, sous un poids considérable, approche le plus du déchirement, Est-il besoin d’ajouter que l’action du roulage à quatre roues est moins déchirante de moitié , et que, par conséquent, son adoption diminuerait de moitié au moins les frais d’entretien des routes ?

En voilà bien assez sur les inconvénients de la charrette. Cependant, je voudrais, en outre, la considérer sous un point de vue moral en quelque sorte. Je demande à la chambre la permission de lui dire quelques mots à cet égard ; je serai très-bref, car je craindrais de provoquer l’ennui de l’auditoire par des longueurs ; je craindrais que le substantif que j'ai répété si souvent devant la chambre ne devint l’adjectif applicable à la manière dont je traite mon sujet.

De l'habitude d’atteler à la file six ou huit chevaux à la charrette, de la difficulté pour un seul homme de les diriger en marchant à côté du limonier, est né l'emploi de ces fouets si longs, si pesants, si déchirants , dont l'usage barbare a dû souvent exciter votre pitié pour ces animaux si fiers à la fois et si soumis aux volontes de l’homme; de là encore la rudesse de langage des conducteurs de charrettes, de là leurs vociférations étourdissantes, de là cette colère quelquefois furieuse dontils paraissent trop souvent animés.

Vous parlerai-je de cet appareil de torture qu’on appelle