Discours de M. le général Cubières, pair de France, ancien ministre de la guerre, membre du Comité d'infanterie : recueillis et précédés d'une notice historique par un officier de l'ancienne armée

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qu'il y a en France une opinion publique dont la modération fait la force, qui ne se laisserait pas égarer par les colères du pouvoir. Je regrette d’employer cette expression ; mais je n’en trouve pas qui réponde à ma pensée, je ne trouve pas de mot qui réponde à ces destitutions que nous avons vues récemment frapper des hommes honorables, des hommes entourés de l'estime publique, des hommes atteints et choisis parmi tant d’autres , qui conservent aussi comme eux la liberté de leur conscience dans des positions dépendantes.

Que dire d’un nouveau mode de destitution qui consiste à tenir pour morts les gens qui ne sont que malades, afin de fournir à la sensibilité ministérielle l’occasion de s’épancher dans des oraisons funèbres anticipées? Il y a dans ces faits quelque chose qui attriste, quelque chose qui pourrait faire désespérer de notre avenir constitutionnel, si nous n’étions pas rassurés par la moralité de la nation. Si nous étions jamais exposés à sentir peser sur nous un pouvoir corrupteur, ce serait là notre sauvegarde et notre salut, La moralité de la nation mous sauverait. Les fonctionnaires que le Gouvernement appelle en si grand nombre dans les enceintes parlementaires conserveront leur indépendance, ne compromettront point la dignité de leur intelligence. Ils ne fléchiront pas devantlesmenaces de destitution, J'en ai pour garant leur patriotisme, leurs lumières et leur dévouement aux lois. Je me permettrai done de dire aux ministres : Faites passer les grands intérêts du pays avant ceux de votre situation ministérielle. Soyez équitables, et vous serez toujours assez forts.

Je pourrais me dispenser de parler de la politique extérieure, qui a pris hier une si grande place dans vos débats. Je n’en dirai done qu’un mot. La conduite que le cabinet tient à l'extérieur, et l’attitude qu’il y prend; me semblent