Discours de M. le général Cubières, pair de France, ancien ministre de la guerre, membre du Comité d'infanterie : recueillis et précédés d'une notice historique par un officier de l'ancienne armée

Er dence, et sans jamais sacrifier aucun des intérêts qu’elle est chargée de protéger.

Ainsi il faut réconnaître que, parmi les hommes éclairés, et même parmi ceux qui ne le sont qu'à demi, il n’y a que des abolitionnistes ; mais il faut avouer aussi que, lorsqu'il s’agit d'appliquer le principe, les abolitionnistes se divisent sur le mode d’application à suivre. Les uns sont ardents, empressés d'atteindre le but ; les autres, disposés à marcher plus lentement et avec quelque réserve dans la voie de l'émancipation ; ‘ceux-là sont impatients, ceux-ci se modèrent sans se refroidir, se modèrent à la vue du sacrifice de nos colonies.

Messieurs, nous pensons que le Gouvernement ne saurait trop se prémunir contre l’ardeur de certains abolitionnistes, qui veulent l'émancipation à tout prix, à l'instant, à la charge du peuple français. Nous croyons que le Gouvernement devrait marcher avec les aholitionnistes fempérés, avec ceux qui se monfrent quelque peu difficiles sur les moyens d’en finir avec l'esclavage, quand quelques-uns de ces moyens tendent à la ruine de nos possessions et de nos compatriotes des Antilles : les intérêts de notre commerce et de notre marine, les principes de l'équité lui en font une loi; il ne saurait s’en écarter sans manquer à tous ses devoirs. Messieurs, la cause de la philanthropie ne doit pas triompher par l'injustice. (Approbation.) Le gouvernement de notre pays serait impardonnable de se lancer aveuglément, intempestivement, sans réserve el sans prudence dans une voie de libération trop brusque et conduisant tout droit à l’anéantissement des colonies françaises. Le Gouvernement serait d’autant moins excusable qu’il a sous les yeux l'exemple de l’Angleterre. Elle a échoué dans sa tentative du travail libre. Malgré le sacrifice d’un demimilliard, malgré une dépense de 500 millions qui sont venus accroître sa dette, l'Angleterre a vu décroitre sans cesse la production dans ses Antilles, el cette décroissance arrivera