Étude sur les idées politiques de Mirabeau

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elle doit être utile et juste; elle doit être populaire et constitu tionnelle. Du reste, elle ne peut qu'être utile, si elle est constitutionnelle. Le roi ne règne que par le peuple et pour le peuple; il doit confondre ses intérêts avec ceux de la nation, sa volonté avec celle de la loi. La liberté publique ne peut se concilier avec l’autorité royale qu'au moyen d’une confiance réciproque, d'une coalition étroite du monarque et de la nation’. Cet accord est réalisé au moyen d'organes par lesquels ce prince connaît les désirs de ses sujets. À côté du roi, qui est son représentant officiel et permanent, le peuple a des mandataires périodiquement élus qui expriment sa volonté : ces députés du peuple forment l’Assemblée nationale?. L'union constante de la couronne et de la nation s'établit par l'entente du monarque et des députés du peuple. Cette entente résulte d’un échange perpétuel d'idées entre le gouvernement proprement dit et l’Assemblée nationale. Telles sont les deux branches du pouvoir ; il importe par-dessus tout qu’elles communiquent sans intermédiaire et tout ce qui peut entraver cet accord doit être écarté ou coupé. En un mot, il faut que la France devienne « une démocratie royale‘. »

Ces réserves faites, Mirabeau veut le maintien de l’ancienne monarchie. Il regarde l’élection du roi comme un idéal’, mais un idéal irréalisable. Dans ses premiers écrits, comme dans ses discours, il soutient l’hérédité. L’hérédité peut seule intéresser le roi à son royaume, écarter les ambitieux 5 et préserver l'État des bouleversements’. Mais, tout en admettant l’héreédité, Mirabeau revendique pour la nation le droit de changer et de restreindre les prérogatives du prince héritier®. Le prince doit être né et élevé

1. Discours du 8 et du 11 juillet 1789. Archives parlementaires, p. 220. Note du 15 octobre 1789. Corr. Mirabeau-La Marck, v. I, p. 371, 380 et 381. Discours du 28 mai 1789. Courrier de Provence, n° VII, p. 10. — Discours du 9 janvier 1790. Courrier de Provence, n° 91.

2. Discours du 1° septembre 1789. Courrier de Provence, n° 35, p. 6.

3. Comme les parlements, les corps privilégiés, les classes aristocratiques, etc. Discours du 3 juin 1789. Courrier de Provence, n° 9. — Ibid., n° 65, p.15. — Discours du 23 juin 1789, ébid., no 9, p. 4. — Jbid., n° 15, p. 23 (1:" juillet 1789).

4. Ibid, n° 34, p. 3. Le mot est du baron de Wimpfen.

5. Discours du 15 septembre 1789. Archives parlementaires, p. 642.

6. Lettres de cachet, t. I, p. 74.

7. Discours du 1 septembre 1789, Courrier de Provence, n° 35, p. 6.

8. Lettres de cachet, t.I, p. 74.