Étude sur les idées politiques de Mirabeau

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niont. Mais Mirabeau était d’un avis contraire. Il réservait au roi le droit de nommer en toute liberté son conseil. « Nous ne prétendons point, lui disait-il, dicter le choix de vos ministres; ils doivent vous plaire®. » Surtout en temps de crise, il importait que le roi ne se laissät pas imposer ses ministres par les députés. Ce serait, disait-il, un « précédent fâcheux par lequel l’Assemblée s’attribuerait un droit exercé sans danger en Angleterre, mais funeste à l’autorité dans un moment où elle n’est pas affermies, En revanche, les ministres sont responsables devant l’Assemblée qui peut, par ses votes de défiance ou ses actes d'accusation 4, suspendre leur pouvoir® et obliger ainsi le roi à les révoquer. La responsabilité des ministres est donc la plus sûre barrière contre leur ambition. On n'entend point qu'ils soient infaillibles et qu'ils réussissent toujours dans les projets qu’ils font pour le bonheur du peuple, mais on demande que leur conduite soit honnête et dictée par leur dévouement au pays; cette responsabilité n’est pas celle du succès, c’est celle des moyens”. Elle s'étend aussi à tous les agents subalternes du pouvoir, qui sont obligés d'apprécier la forme des ordres qu'ils se chargent d’exécuters. Quand un acte royal est critiqué, ce sont les conseillers du prince qui sont en vue?. Ils sont par conséquent responsables des discours du trône; aussi tout message du gouvernement et tout autre communiqué de ce genre doivent-ils être revêtus de leur signature et de leur contreseing*. Mirabeau n’a pas toujours trouvé ces précautions suffisantes pour contenir les bornes alors bien limitées de l'influence ministérielle. Que l’on ne s’y trompe pas,

1. Adresse au roi du 16 juillet 1789. Archives parlementaires, p. 241.

2. Le député Bergasse. Note du 4 octobre 1790. Corr. Mirabeau-La Marck, vel ip 2235:

3. Note du 16 octobre 1790. Corr. Mirabeau-La Marck, v. Il, p. 235.

4. Discours du ?4 juin et du 16 juillet 1789. Archives parlementaires, p. 240-243. Courrier de Provence, p. 19, et n° 74, p. 16 et 17 (2 décembre 1789).

5. Archives parlementaires, p. 243.

6. Courrier de Provence, n° 55, p. 15 (13 juillet 1789). — Discours du 27 août 1789. Archives parlementaires, p. 499.

7. Discours du 23 février 1790. Courrier de Provence, v. VI, p. 401.

8. Discours du 22 août 1789. Archives parlementaires, p. 471-472.

9. Courrier de Provence, n° 9, p. 4 (8 juillet 89). Dans sa répartie à M. de Dreux-Brezé, du 23 juin 1789, Mirabeau proteste, non pas contre la volonté du roi, mais contre « les intentions qu’on a suggérées au monarque. »

10. Courrier de Provence, v. VI, p. 146.

11. Zbid., n° 50, p. 16, v. VIE, p. 162-163.