Étude sur les idées politiques de Mirabeau
54 F. DECRUE.
l’Assemblée ou Corps législatif, il relève aussi du pouvoir royal. Telles sont les idées de Mirabeau. « A ses yeux, dit Dumont, le roi était partie intégrante du pouvoir législatif!. »
Mais s’il collabore à la loi, il est formellement exclu du pouvoir constituant. Il faut distinguer ici la loi de la Constitution, le pouvoir législatif du pouvoir constituant. Quand les représentants élus du peuple souverain organisent l'État et les pouvoirs qui le forment, tous les pouvoirs, même celui du roi, restent suspendus devant eux?. C’est un point capital dont dépend le succès de la Révolution*. Le roi doit laisser les états généraux s'organiser en Assemblée nationale sans s’ingérer dans leur régime intérieur, sans décider, par exemple, s’ils délibéreront par ordre ou par têtes.
Mirabeau se laisse souvent guider par son caprice ou par l’intérêt populaire quand il distingue l’acte constituant qu’introduit l’Assemblée, mais dont le roi est exclu, de l’acte législatif introduit aussi par elle, mais où le roi peut intervenir. Ainsi, lorsqu'il fut question d’abolir les dîimes ecclésiastiques, il prétendit qu'il s'agissait alors de constituer, afin que l’Assemblée eût sa pleine liberté d'action et que Louis XVI ne pût s'opposer à cette mesure. Le roi peut, il est vrai, présenter des observations sur la Constitution ; mais elles restent sans conséquence. Mirabeau semble même lui promettre de plus grandes attributions : « Les députés de la nation, lui dit-il, sont appelés à consacrer avec vous les droits éminents de la royauté sur les bases immuables de la liberté du peuple’. — L'Assemblée, dit-il ailleurs, travaillera de concert avec le roi à l'établissement de la Constitutions. » Mais ces déclarations ne sont que des formules polies. En somme, l’idée de Mirabeau est de se passer du roi dans tout acte constituant ; le roi n'intervient alors que pour le promulguer et le faire exécuter ?.
. Dumont, p. 288. . Discours du ? et du 16 juillet 1789. Archives parlementaires, p. 243. . Lettres à mes commettants, n° 15. . Ibid., no 13 (23 juin 1789). . Moniteur (Discours des 18 mai, 27 mai, 5 juin, 27 juin 1789). Journal des états généraux, n° Il; Leltres à mes commetiants, n 4, p. 15; n° 6, p. 6; n° 7, p. £, 5, 7, et 14; n° 9, p. 11 et 12 et n° 14. 6. Moniteur (Discours du 13 août 1789). Courrier de Provence, n° 27, p. 4. 7. Archives nationales, A. P. C. c. 2 1. 15. Cote 224. E, 11. 110 (Adresse du 9 juillet 1789). Leltres à mes commettants, n° 18. 8. Moniteur (Adresse du ?7 juin 1789). 9. Archives parlementaires, p. 636 et 637 (Discours du 14 septembre 1789).
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