Étude sur les idées politiques de Mirabeau
LES IDÉES POLITIQUES DE MIRABEAU. 55
Si le roi se trouve évincé du pouvoir constituant, il participe du moins au pouvoir législatif. Tout d’abord, il lui appartient de convoquer l’Assemblée nationale !, de l’ajourner et même de la dissoudre, à condition toutefois d’en convoquer une nouvelle dans l'espace de trois mois?. Ce droit de dissolution fut refusé par l'Assemblée, et Mirabeau n’osa insister sur ce point. En outre, le gouvernement a sa part d'initiative parlementaire et les projets de loi peuvent être indifféremment présentés par lui ou par les députés®.
Mais le roi intervient surtout dans la législation par son droit de veto. Tant que la Constitution n’est pas faite, disait Mirabeau, le roi n’est que le législateur provisoire ; mais dès que le Corps législatif est en activité, le roi coopère par sa sanclion, qui est le consentement accordé ou refusé à un projet de loi. Le refus de la sanction ou weto est donc une opposition aux décrets de l'Assemblée. « Mirabeau, rapporte Dumont, était bien décidé à sou tenir le veto absolu qu’on regardait comme essentiel à la monarchie{. » Dès l'ouverture des états généraux, en effet, il insistait sur l'importance et la nécessité de la sanction royales : « Et moi, Messieurs, disait-il à ses collègues, je crois le vefo du roi tellement nécessaire que j'aimerais mieux vivre à Constantinople qu'en France s’il ne l’avait pas. » Il y fait encore allusion en disant : « Quand il sera question de la prérogative royale, c’està-dire, comme je le démontrerai en son temps, du plus précieux domaine du peuple, on jugera si j'en connais l'étendue. Eh! je défie d'avance le plus respectable de mes collègues d'en porter plus loin le respect religieux®. » Dans le célèbre discours qu'il prononce sur cette question, Mirabeau soutient le veto absolu, en dépit de la majorité de l’Assemblée qui ne devait accorder au
1. Lettres à mes commettants, n° 14 (27 juin 1789). — Archives parlementaires, p. 186 (Discours du 3 juillet 1789).
2. Ibid., p. 539-541 (Discours du 1 septembre 1789). Courrier de Provence, ne 41, p. 20 (12 septembre 1789). — Malouet, Mémoires, v. II, p. 13.
3. Courrier de Provence, n° 47, p. 17 (29 septembre 1789), v. VII, p. 163; v. IX, p. 383. — Malouet, Mémoires, v. II, p. 13. Les rédacteurs du Courrier ne sont pas loujours d'accord avec Mirabeau sur ce point. Cf. Leitres à mes commettants, n° 13, et Courrier, v. IX, p. 383.
4. Dumont, p. 152.
5. Moniteur (Discours du 15 juin, du 93 juin, du 27 juin, du 28 juin 1789). Lettres à mes commettants, n° 11, p. 13 et 39, n° 14; Courrier de Provence, n° 34, p. 9:
6. Moniteur (7 août 1789). Courrier de Provence, n° ?4.