Histoire de la Révolution, 1747-1793 [i.e. 1774-1793]. République
62 HISTOIRE
mançqua à l'appel: alors le murmure de mille voix s'éleva: « Cherchons-le où les boulets tombaient, » s’écria un vieux chevronné, « c'était toujours là « sa place. — « Il y était, » reprit un fantassin dont les blessures étaient bandées; € j'y étais «aussi moi... et j'ai eu beau lui dire: M. An« toine, méfiez-vous! il s’est obstiné à relever « tous les éclopés, si bien que l'ennemi voyant « qu'il nous remettait sur pied, l'a trouvé de « bonne prise et l’a emmené, quoique, pour ma « part, je l'aie défendu de Ja main qui me restait.»
Peu après il y eut fête au camp, Antoine fut ramené par un échange de prisonniers; quatre fois il paya de sa liberté l'élan d’une noble abnégation, puis revint dans nos rangs. Mais la cinquième fois il ne voulut pas revenir, il était retenu sur la terre étrangère par le lien de la science.
Le jeune prisonnier avait été accueilli par Meyer, l’un des plus habiles chimistes de lAIlemagne; ce savant ouvrit à l'Europe une des voies du progrès.
Les trésors du laboratoire du maître furent explorés avec ardeur par Antoine; en un an d’étude pratique, il fit un pas immense dans les combinaisons de la chimie. Un jour, l'élève vit avec étonnement, près de l'appareil du célèbre Meyer, une touffe de tubercules dont il ne pouvait comprendre l'emploi; il interrogea le professeur : « Ce sont des pommes de terre, » répondis le docte chimiste; « hier en en mangeant j'ai pensé