Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

ui LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

consternation; il semblait qu'une calamité publique fût sur le point de frapper la France. Un peuple immense se pressait autour de sa demeure et gardait le plus profond silence. Le roi et la reine, terrifiés de l'abandon dans lequel ils allaient se trouver si cette main puissante se retirait d'eux, envoyaient à chaque heure du jour prendre des nouvelles du mourant: Le rédacteur des Révolutions de Paris, qui déjà demandé la suppression de la royauté, apprend que le roi a envôyépour s'informer de Mirabeau, et il écrit: «Sachons gré à Louis XVI de n'y avoir pas été lui-même, c'eût été une diversion fâcheuse, on l'aurait idolâtré. » À mesure que les bulletins répandus dans la foule devenaient plus inquiétants, l’effroi et la douleur augmentaient. Démocrates, aristocrates, tous venaient avec anxiété solliciter des nouvelles. Get empressement fut sensible au moribond. Barnave, son ennemi, sé présenta chez lui, au nom des jacobins, et Mirabeau en ressentit une douce émotion.

Bien entendu, tous les partis se reprochaient sa mort et s'accusaient mutuellement de l'avoir empoisonné. En dépit des soins prodigués par ses amis, en dépit des vœux ardents de tout un peuple, Mirabeau s'étei= gnit le 2 avril, « emportant avec lui les derniers lambeaux de la monarchie ». Quand il sentit sa fin approcher, il fit ouvrir les fenêtres : « Mon ami, dit-il à Cabanis, je mourrai aujourd’hui, il ne reste plus qu'à