Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

416 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT en soi-même. Il est mort d'une fièvre intermittente d'une espèce maligne. »

Edmond de son côté mande à son père tous les dé-

tails qu'il a pu recueillir sur la fin de ce grand citoyen :

5 avril.

« Cette mort, presque subite, a jeté ici une consternation douloureuse, qui n'a pas sans doute tardé à se répandre dans tous nos départements. Je partage la tristesse publique bien vivement, je t'assure, et la perte que la France vient de faire de cet homme vraiment grand sous tous les rapports m'a singulièrement frappé. Ici, au lycée, tout respire la plus profonde tristesse; Le jour qu’il mourut, on écrivitsur un grand tableau, en place de bulletins, ces mots atterrants : ILest mort, en grandes lettres noires. Le lendemain, il devait y avoir un concert, qui n'eut pas lieu, et le mot deuil fut encore écrit sur le tableau. Chacun est costumé en noir : je ne peux encore te donner de détails sur les derniers moments de ce grand homme, ni sur son enterrement qui se fait aujourd'hui, apres l'ouverture de son corps, à laquelle on procède pour tranquilliser le peuple, qui a soupçonné qu'il avait été empoisonnét. }

1. Le corps fut ouvert en présence d’un commissaire de chaque section. « Les préventions populaires en ont fait une nécessité, écrivait le comte de la Marek, il s'agit d'interroger la