Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

82 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

dont il sera parlé dans tous les siècles à venir sont bien faites pour combattre avec succès le doux penchant qui l’attache à Bordeaux. »

Les travaux du Champ de Mars n'avancent que péniblement et l’on se demande avec anxiété si l'on sera prèt pour le 14 juillet. Aussitôt, pour hâter les préparatifs, l’on fait appel aux Parisiens, qui accourent à l'envi:

« Paris, le 5 juillet 1790.

« Papa,

« L'on payait il y a quelques jours environ quinze mille ouvriers pour travailler au Champ de Mars; ce n'était qu'une foule de désœuvrés qui gueusaient dans Paris; la ville leur donnait quarante sols par jour et la nourriture, mais ces coquins, sentant bien qu'on avait besoin d'eux, ont voulu se faire valoir. C'est pourquoi ils ont commencé à travailler avec nonchalance et les travaux ne marchaient pas. Non contents de cela, ils allaient pendre un de leur chefs qui voulait leur représenter leur devoir, quand M. de La Fayetté arriva fort heureusement. Il contint cette populace et, pour endormir leur fureur prête à éclater, il leur promit quarante sols et la nourriture pendant les quatre jours de Fédération, jours où ils ne feron rien.

« L'ouvrage n'allant pas plus vite pour cela, les Parisiens se sont rendus en foule au Champ de Mars,