L' Atlantide : exposé des hypothèses relatives à l'énigme de l'Atlantide : avec 23 figures et cartes

DE L'AGE DU BRONZE 213

tata), dont l'habitat habituel est le Groenland, tandis que la femelle est un autre phoque, que Schneïder me paraît avoir identifié avec une otarie, mais qui est plutôt, je crois, le morse (Trichecus Rosmarus), aussi du Groenland. Le caractère le plus frappant de la silhouette du morse est, en effet, la présence des longues défenses d'ivoire qui descendent verticalement au devant de sa poitrine. Or, Elien prête à la femelle du « bélier de mer » des appendices, pendant sous le cou, pareïls à des tresses ou à des cordes (plokamous) et qu'il compare à ce qui pend sous le cou des coqs ou des pintades. Elien nous dit de plus qu’on ne connaissait les béliers de mer que par des dessins (graphès cheirourgia), ce que Schneider traduit a pictoribus, et par des reliefs (plasmati : a fictoribus). Je pense donc que la nature véritable des appendices ainsi figurés a pu échapper à Elien ou à ses informateurs. Du reste, si Elien décrit ensemble ces deux phoques, sans les distinguer, Pline, qui parle aussi des deux ensemble, à l’occasion d’un échouage de monstres sur la côte de la Saintonge, sous Tibère, les distingue. Il nomme l’un d’eux aries et l’autre elephantus. Il signale les défenses d'ivoire de ce dernier. Jacques Daléchamp a très bien vu que le second était le morse (1) et il reproduit le nom Rosmarus, qu'Olaus Magnus lui avait donné et que Linné a conservé. La légende de l’Atlantide renfermait donc des éléments d'origine populaire, étrangers aux textes platoniciens et selon lesquels il s'agissait d’une terre située dans les régions relativement froides, où des phoques à capuchon et des morses pouvaient venir s’échouer fréquemment. Solinus, contemporain d’Elien, connaissait l’usage que faisaient les Britanni de l’ivoire des monstres marins.

LE CLIMAT DE L'ATLANTIDE

En ce qui concerne la légende connue de Platon, on constate la juxtaposition de renseignements suivant lesquels le climat de l’Atlantide était un climat chaud, avec grands mammifères, plantes alimentaires de caractère tro-

1. Pune : Histoire naturelle, IX, 5, p. 202 de l'édition de Jacques Daléchamp, Lyon, 1587.