L'atomisme d'Épicure

perception (1). Dans la difficulté d'expliquer l’âme par sa doctrine des atomes corporels, — dans laquelle, d’ailleurs, le matérialisme se trouve toujours — notre philosophe cherche le refuge en supposant une substance indéterminée de l'âme.

Les rapports sur les parties de l'âme chez Lucrèce sont contradictoires (2). Plusieurs idées claires peuvent néanmoins en être séparées.

On ne peut pas désunir les quatre substances de l'âme, car elles sont comme les diverses propriétés d'un corps. La quatrième substance est le plus profondément cachée dans notre corps; on peut la considérer comme l'âme de l'âme (3). Les trois autres font une unité, bien qu'une d'elles prédomine toujours. C’est la chaleur qui domine dans la colère, le souffle froïd dans la crainte, «et l'air dans la tranquillité de l'âme (4): Ainsi Lucrèce rattache les proportions diverses des éléments constitutifs de l'âme aux tempéraments divers des hommes et aux humeurs variées des animaux.

Lucrèce nous a conservé des exemples qui montrent la petitesse de la substance de l'âme. Dans le conps d'un homme mort les membres ne perdent rien ni dans l'aspect, ni dans le poids, car la mort n'ôte rien du corps que la sensibilité et la chaleur vitale. À ce propos, le corps quitté par l'âme est comparé d'une façon poétique au vin qui a perdu son bouquet, au parfum dont l'odeur s’est dissipée, et au corps qui a perdu sa saveur (5). Le matérialiste Epicure s'efforce d'expliquer la différence entre l'âme et le corps, différence qu'il ne consi-

dère pas comme essentielle, en accordant à l'âme la plus

grande subtilité possible. La doctrine de l'âme d'Epicure s'éloigne de celle de Dé-

(1) Cf. D.L. 65 et 66 scholie; Plut. De plac. phil. IN, 5; Aët. Plac. IN, 5,11; Dox. 588b, 21 : Plut. Adu. Col. 20, 1118d. La discussion pour savoir si la quatrième substance sans nom es! l'élément de l'esprit ou de l’âme (en rapport avec DL. 65, où parmi les parties de l'âme ne sont mentionnés que le souîfle et la chaleur), nous paraît inutile (cf. Giussani, Studi lucreztani, p. 190-192).

(2) Sur ces contradictions voir la thèse de Güdeckemeyer, p. 5455.

(5) Cf. De R. N. II, 262- 981.

(4) Cf. Ibid. III, 281-506.

(5) Cf. De R. N. III, 208-230.