La correspondance de Marat

LA CORRESPONDANCE DE MARAT 105

péré de voir les aristocrates qui dominent dans l'Assemblée nationale se jouer du peuple, en donnant perpétuellement le change à ses représentants, aller au-devant des vœux du ministre favori, s'opposer aux lois fondamentales qui doivent consacrer les droits de la nation, et ne faire décréter que celles qui établissent les prérogatives de la couronne, rendent le Prince l'arbitre des lois, et remettent dans ses mains les chaines du despotisme, j'ai eru qu'il était indigne d’un vrai cifoyen de garder le silence, et de ne pas dévoiler aux yeux de la nation la noire trame ourdie contre elle. En conséquence je lui ai dénoncé, il y a six semaines, dans une feuille intitulée Le Moniteur Patriote, le travail alarmant du Comité de Constitution, rédigé par M. Mounier : la vertu de ce digne député a été appréciée, et ses collègues ont battu en retraite. Ensuite j'ai dévoilé les artifices de la faction odieuse, dont le vicomte de Noailles s’est montré l'organe. Ayant toujours suivi d’un œil inquiet les mouvements de ce parti plus que Jamais redoutable, et ne l'ayant vu se relever qu’au moment où les représentants de la Commune de Paris, oubliant les bornes ‘du pouvoir dont ils ne sont que simples dépositaires, ont donné ordre à la milice bourgeoise de dissiper les pelotons du Palais-Royal, sous prétexte d'empêcher les attrou-. pements tumultueux; ordre attentatoire à la liberté publique, en ce qu’il enlève aux citoyens le droit qu'ils ont de s'assembler partout où bon leur semble, pour s'occuper des affaires de l’État; puis rapprochant mille faits connus, et suivant les relations de l'aristocratie et du gouvernement avec la municipalité de la capitale, j'ai redouté qu’elle ne se prêtt, sans s’en douter, aux perfides desseins des ennemis de l'État. Mes craintes se sont renouvelées, lorsque j’ai vu le Maire, académicien comblé de pensions du Roi, chercher à attirer sourdement à lui toute l'autorité municipale, et conserver dans l'ancien Comité des subsistances des membres qui déplaisaient aux Districts. Elles ont augmenté lorsque j'ai vu les représentants de la Commune s’ériger