La France sous le Consulat

82 LA FRANCE SOUS LE CONSULAT

gru, réfugié lui aussi en Angleterre après s'être évadé de Cayenne où il avait été déporté lors du coup d'Etat du 18 fructidor. Pichegru devait servir d'intermédiaire entre les royalistes et le général Moreau, qui, mécontent et déçu dans son ambition, était, croyaient-ils, tout prêt à devenir un factieux ; grand homme de guerre, mais caractère faible et indécis dans la vie civile, il devait être le restaurateur de la royauté que n'avait pas voulu être Bonaparte, et procurer aux royalistes le concours des républicains de l’armée, du Tribunat, des anciennes assemblées.

A ce mouvement républicain dans Paris devait correspondre une insurrection royaliste en Vendée. Au moment favorable, le comte d'Artois, son fils le due de Berry, et les principaux chefs de l'émigration débarqueraient en France pour prendre la direction et recueillir le fruit des événements. Georges Cadoudal, esprit clairvoyant et pratique qui ne se nourrissait pas d'illusions comme les émigrés, ne tarda pas à voir l'inanité de ce projet. La Vendée écrasée, soumise, gagnée peu à peu par une administration tolérante et réparatrice, était dégoûtée de la guerre civile. Le clergé catholique, principal soutien jusqu'alors de la royauté, abandonnait les Bourbons vaincus et impuissants en faveur du victorieux et du fort visiblement marqué par le Très-Haut pour restaurer en France l'Eglise proscrite et abattue et sceller avec elle une nouvelle alliance. D'un autre côté, si Moreau s’abouchait avec Pichegru et consentait à se réconcilier avec son ancien compagnon d'armes, ul n’entrait pas pour cela dans les desseins des royalistes. Cadoudal résolut donc de supprimer d'abord Bonaparte, comptant que la stupeur et l'anarchie qui suivraient sa disparition serviraient suffisamment la cause royale. Il décida de attaquer avec les plus déterminés de ses chouans, soit au Carrousel pendant une revue, soit sur la route de la Malmaison à Paris, au milieu de son escorte, déguisant ainsi le guet-à-pens sous les cou-