"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

LA BALLADE DE L’ÉPOUSE D’ASAN-AGA.

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« L’accordée te salue bien, Et bien te prie par cette lettre, Quand tu rassembleras les seigneurs svats, D’apporter un long voile pour l’accordée, Afin qu’en passant devant le palais de l’aga Elle ne voie point ses petits orphelins. » Son frère ne lui refuse point cette grâce. Il envoie la lettre aukadi; celui-ci rassemble ses amis (« les seigneurs svats ») et part pour chercher l’accordée, lui portant le long voile qu’elle a demandé 1 . Et nous voici en pleine action dramatique : A bon port les svats arrivèrent chez l’accordée Et en bonne santé avec elle repartirent. Mais quand ils arrivèrent devant le palais de l’aga, Les deux filles les regardent de la fenêtre, Et les deux fils sortent au-devant d’eux, Et à leur mère ils parlent : «. Reviens chez nous, notre chère maman, Que nous te donnions à dîner. » A ces paroles, l’épouse d’Asan-Aga Parla ainsi au premier des svats : « Mon frère en Dieu ! premier des svats, Fais arrêter les chevaux devant le palais, Que je donne'des cadeaux à mes orphelins. » On arrêta les chevaux devant le palais. A ses enfants elle fait de beaux cadeaux : A chaque fils, des couteaux dorés, A chaque fille, une robe de drap [longue] jusqu’au pré, Et à l’enfant au berceau Elle envoie des habits d’orphelin. Le brave Asan-Aga, qui a vu de loin cette scène, rappelle autour de lui ses enfants : « Venez ici, mes orphelins, puisqu’elle ne veut pas avoir pitié de vous, votre mère au cœur infidèle. » Le dénouement du poème tient en quatre vers :

1 Ces derniers mots manquent dans le texte original, mais ils se retrouvent dans la traduction de Fortis. 24