"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

« LA GUZLA » EN FRANCE.

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« Le recueil de ces chants a été traduit de l’illyrique en français par un Italien très familier avec les deux langues. Ce petit volume mérite d’être lu en entier. Nous nous contenterons d’en citer un chant qui paraît être des plus anciens et qui, comme les chants des montagnards grecs, s’est perpétué débouché en bouche. » Après quoi, l’auteur de cette anonyme notice cita le Morlaque à Venise en entier. Six jours plus tard, le Moniteur donna un article sur la Guzla, signé « N. », qui semble être écrit par quelque ami de Mérimée, qui, sans vouloir cependant dévoiler le secret, se permit de faire une allusion assez claire à l’auteur du Théâtre de Clara Gazul. « Aurait-on supposé, il y a moins de vingt-cinq ans, l’existence d’un écrivain assez hardi pour traduire des poésies illyriques, un libraire assez mauvais calculateur pour les publier, un journaliste assez téméraire pour en rendre compte avec quelque éloge ? Y aurait-il eu assez de risées, de sifflets pour les punir? Concevez, si vous le pouvez, la belle colère des Laharpe, des Geoffroy! Grand Dieu! régaler de poésies dalmates, bosniaques et consorts, la nation du goût le plus pur, le plus classique, le plus sévère! Vouloir faire prononcer des noms barbares à déchirer la bouche ! Y pensez-vous ? Eh ! qu’est-il besoin de productions étrangères, même des moins imparfaites ? Qu’avons-nous à désirer ? N’avonsnous pas nos chefs-d’œuvre et les productions de ceux qui tentent chaque jour de les imiter ? « Alors, le père Bouhours n’avait pas encore tout à fait tort. De la littérature anglaise, nous ne connaissions Shakespeare que parles parodies de Voltaire ; l’on s’arrêtait à peu près à Pope et aux écrivains de la reine Anne. La littérature allemande, hors Gessner, nous était 26