La légende de Cathelineau : ses débuts, son brevet de généralissime, son élection, sa mort (mars-juillet 1793) : avec nombreux documents inédits et inconnus

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« Nous sommes perdus, dit-il, si on en reste là : notre « pays va être écrasé par la République. Il n’y a pas « de vengeance qu'elle ne tire pour ce qui s’est passé. « Il faut nous insurger tout à fait et commencer la « guerre dès aujourd'hui, »

Sa femme, en l’entendant, tâche de le calmer; elle le prie de continuer au moins et d'achever sa boulangerie. Il la reprend un instant; mais déjà il était tellement animé que, labandonnant entièrement, il se dépâte les mains et prend ses vêtements.

La curiosité avait attiré auprès de Blon et de la maison de Cathelineau, cinq à six hommes ou garçons. Il leur propose de s’armer sur-le-champ.et d’aller faire des recrues dans tout le bourg. Ils sortent avec lui, paraissent sur la place, se répandent dans les rues et dans les maisons. Cathelineau parle avec cette force à laquelle rien ne résiste ; chaque mot qu’il prononce est comme un trait enflammé qui pénètre les cœurs; il est impossible de l’entendre sans entrer dans ses sentiments ; sa voix est comme un feu qui électrise tous ses auditeurs. Sans balancer, sans hésiter, ils se joignent à lui. Dans un instant, la petite bourgade fournit vingt à vingt-cinq hommes, armés de tout ce qu’ils ont pu trouver, mais remplis du courage qui vient de leur être inspiré.

Ce sont ces vingt hommes, que je regarde comme le noyau de l’armée. Nulle part encore, dans notre partie de Maine-et-Loire, il n'y avait eu de coalition formée ; aucun chef n'avait paru ni annoncé un projet formé d'attaquer les républicains. Mais déjà Cathelineau avait le sien, et il annonçait, en proposant d’aller de suite à