La politique religieuse de la Révolution française : étude critique suivie de pièces justificatives

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rage, nous leur jetons un morceau de pain. Eh bien, pour que les prêtres ne s’élancent pas sur nous, ne laissons pas oisive leur voracité, et donnons-leur du pain. Alors ils seront paisibles. Leur intérêt est le dieu qu'ils adorent ; ils seront patriotes, car un prêtre qui a de quoi manger devient moins dangereux. j

Et dans quel moment vient-on vous proposer une mesure aussi impolitique ? C’est dans un moment où la nation va s'occuper du jugement d’un grand coupable, c’est dans un moment où, pour consolider une République naissante, nous avons besoin du calme le plus profond, et où nous devons éviter jusqu'à la moindre apparence de discordes civiles. |

Voudrait-on jeter des semences de division parmi les citoyens dans un moment où ils doivent marcher réunis vers les grands intérêts de la patrie ? Gardonsnous donc d'adopter une mesure aussi impolitique. Mais ce projet de décret n'est pas seulement impolitique, il est injuste et barbare. Quoi de plus injuste et de plus barbare que de sacrifier des milliers d'êtres sensibles aux calculs d’une meurtrière économie ? L'économie d’un grand peuple c’est la justice et la générosité.

Or, serions-nous justes et généreux envers cette foule innombrable de victimes de l'erreur, que la superstition avait amoncelées dans ces cachots nombreux appelés couvents, si nous les plongions dans les noirceurs de la misère ? La main de la philanthropie n'aurait-elle brisé les portes de ces affreux asiles où gémissaient tant d'êtres infortunés, que pour les faire repentir un jour d’avoir respiré avec nous l'air de la liberté ? Pourquoi chercher à leur faire maudire une patrie dont ils bénissent la bienfaisance ? J’appelle surtout l'humanité de la société sur ce sexe faible et délicat que le despotisme des familles ou le fana-