La Révolution française (1789-1815)

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l’assujettissement de tous, on voit quelques hommes subitement éclairés d'une lumière qui semble sortir d’euxmêmes. Ils sont comme les cimes de l'Humanité, qui rayonnent sous un soleil invisible, quand le reste de la terre est encore dans les ténèbres. Si ce petit nombre d'hommes disparaissait, la nuit seule s'étendrait sur tout un siècle. Otez du xvim° siècle Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Buffon, Diderot, Turgot, et dites ce que devient l'esprit humain ! Aux clartés de ce premier groupe s'éclaire, s'échauffe, s'allume un groupe plus nombreux, mais qui n'est encore qu'une imperceptible fraction au prix de la multitude; et ce sont ceux-là qui commencent à agir sur elle, à l’exciter, à la provoquer. Ils font descendre sur ce froid limon une partie du feu sacré qui les dévore. Longtemps la foule, en apparence inanimée, résiste à toutes les excitations des esprits supérieurs. Elle ne peut s'échauffer d'un si noble feu et elle les désespère par son inertie ou son incapacité. C'est le temps des plaintes de Voltaire et des Encyclopédistes, de d’Alembert, de Mably, de Mirabeau dans sa jeunesse, de Lafayette à la réunion des Notables, Tous ceux qui se sont hâtés s'indignent de la lenteur que les masses mettent à les suivre ou même à les comprendre. Epoque de 1770 à 1788.

« Enfin une partie de la masse a ressenti l'effet de cette longue incubation du génie. On dirait qu'une âme a pénétré ce qui n'était auparavant qu’une inerte argile. Les secrets, les aspirations de quelques-uns, en devenant l'âme du plus grand nombre, lui apportent à la fois la chaleur, la vie, le mouvement, l’audace. C'est la foudre qui a allumé toute une forêt; et comme la masse a été lente à s’animer, comme elle n’a d’abord suivi que de loin et en rampant ses hardis iniliateurs, maintenant c'est