Lazare Carnot d'après un témoin de sa vie et des documents nouveaux

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premier l’idée d’un télégraphe aérien. « Le mouvement perpétuel est en mécanique, le seul problème qui soit impossible. » C'est un trait de génie, disait-il. Le mouvement perpétuel est impossible : voilà un axiome. Ajouter : lui seul est impossible, c'est marquer d'un mot caractéristique, sur la route de la science, la limite qu'on peut atteindre sans jamais la franchir.

En septembre 1800, il disait à Arago, qui, à l’âge de 23 ans, venait d’être nommé académicien en remplacement de Lalande, par 47 voix sur 52 votants: Il y a cinq problèmes dont un savant ne doit pas s'occuper ; ce sont, comme les appelait Montucla, les écueils de l'esprit humain; les voici par ordre alphabétique :

1° La Direction des ballons; 2° La Duplication du cube; 3° Le Mouvement perpétuel; 4° La Quadrature du cercle; 5° La Trisection de l’angle.

Le problème du mouvement perpétuel est absolument insoluble, par la raison très simple et très positive qu’il n’est pas dans la nature des choses qu'une machine quelconque puisse lui rendre autant de force que nous lui en avons transmis, à moins qu'on ne l'envisage sous l'aspect de la transformation de l'énergie. Alors, c'est une autre question.

Dans son traité, Carnot a fait voir non seulement que toute machine, quelle qu'en soit la forme, abandonnée à elle-même, s'arrêtera inévitablement ; mais de plus, il assigna l'instant même où cela doit arriver. Malgré ces arguments irréfutables, d’une rigueur incontestable, les chercheurs de la direction des ballons, les duplicateurs du cube, les faiseurs de mouvements perpétuels, les quarreurs du cercle, les inventeurs de la trisection de l'angle, ne se sont jamais découragés. Arago,