Le Comité de salut public de la Convention nationale

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Ces masses, soulevées pour défendre leurs droits les plus précieux, étaient remplies d’une ardeur, d'un enthousiasme, qui n'avaient d'égal que leur inexpérience. — Faire servir cette inexpérience mème, cette ignorance des vieilles règles à transformer l’ancienne tactique, à créer hardiment un art nouveau, tel fut le but que poursuivit le Comité de salut public; et cette tactique révolutionnaire qu’il adopta et généralisa nous assura la victoire aussi longtemps que nos adversaires ne songèrent pas à nous imiter.

Il

Voyons d’abord comment il obtint et organisa matériellement le nombre. Dans les dernières années de l'ancien régime, les publicistes, — Turgot, Condorcet, Mirabeau, Servan, — demandaient déjà le service militaire obligatoire pour tous, l'exclusion des étrangers des troupes françaises, la formation de gardes nationales dans chaque paroisse, en un mot la nation armée. Aussi, c'est spontanément que, dès les mois de juillet et d'août 1789, s'organise à Paris et dans toute la France, dans des circonstances diverses et sous des noms différents, la garde nationale; mais partout elle conserve, « avec le désordre de sa formation primitive, l'harmonie morale de l'inspiration qui la créa (1) ». On eut le spectacle prodigieux, unique jusqu'alors, de six millions d’hommes se levant pour défendre leurs droits. La distinction, bientôt établie, entre les citoyens actifs et les citoyens passifs, réduisit ce chiffre de plus de moitié. Mais à la

(1) Ch.-L, Chassin, l'Armée de la Révolution.