Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

SUR LE FRONT DE SALONIQUE 203

heures, le soleil monta vers l'Est et inonda la plaine. Point de ces gradations savantes des aurores du pays de France. Point de ces tons roses ou mauves où l’aube hésite au seuil du jour. Point de chant du coq dans le creux du vallon. Point de jeux de lumière derrière la colline, à travers les futaies. En face de nous, c'était la plaine du Vardar, une plaine plate, nue, sans colline, sans futaie, sans vallon, sans coq aussi, — car les rares Macédoniens à qui dix années successives de guerre n’avaient pu faire abandonner leurs villages en ruines, étaient partis de la veille, évacués, eux et leurs bêtes, par l'autorité militaire. Ce fut comme l'éclat soudain d’un projecteur gigantesque à feu rouge qui se fixa sur le fleuve et ses marais déserts. Là-haut, vers les Portes-de-Fer, dans la Macédoine serbe, les casques bleus ont combattu sur les bords d’un Vardar torrentueux, aux eaux sonores, roulant au pied de montagnes à pic. Ici, dans la Macédoine grecque, l’armée d'Orient qui défend Salonique campe sur