Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma, page 115

LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION 103

une réponse adressée par le procureur de la Commune, à MM.les administrateurs de police. Nous y relevons les passages suivants : « Quelques directeurs de spectacle ont demandé aux magistrats du peuple s'il fallait fermer leurs théâtres pendant la quinzaine de Pâques. Je leur dois une explication, et c’est à vous, Messieurs, à la juger.

« Lorsque la France se courbait sous une religion dominante, lorsque nous étions condamnés à faire tout ce qu’un seul voulait, le lieutenant de police pouvait bien faire une loi avec des prêtres; mais quand, après une longue nuit, la vérité se montre, fait honte aux dupes et peur aux fripons; quand la liberté ne veut plus de tyrans, ni l'égalité d’esclaves; quand une constitution protège tous les cultes comme toutes les opinions; alors il n’y a plus que le peuple qui, par ses représentants, puisse commander des fêtes, les fêtes de la patrie, et il faut que les religions se renferment toutes, Sans se car cher, dans leurs temples. Choisit qui veut, où une église, ou une synagogue, ou une mosquée. Personne ne conçoit mieux que vous, Messieurs, que si chacun est maître de ses talents comme de ses pensées, il ne doit pas plus être défendu de jouer une pièce ie Vendredi-Saint, que de la faire, à ceux du moins qui ne partagent pas le deuil de la religion.

« L'industrie a les mêmes droits que le commerce, etiln'y a jamais que l'intérêt public qui puisse les suspendre. Mais, sous quel prétexte la municipalité, gardienne de toutes les propriétés, condamneraitelle au repos une foule de citoyens que le théâtre fait vivre, et une foule plus grande encore qu'il amuse et qu’il instruit; et après une révolution surtout qui prouve si bien que les tragédies de Voltaire formeront plutôt les nations que les sermons de l'abbé Maury? Nous touchons à l'époque où le