Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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342 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

successivement, lorsqu'enfin un coup fatal fut porté à cette entreprise par la mort de Marie Elisabeth Joly, première soubrette, succombant à une maladie de poitrine, le 16 floréal an VI (5 mai 1798), âgée de trente-sept ans, et dans tout l'épanouissement d’un talent très sympathique.

Peu de temps avant, elle avait fait débuter ses deux jeunes filles dans l’Oracle, comédie féerique en un acte de Saint-Foix; l’aînée jouait le rôle d’Alcindor, la jeune celui de Lucinde, et leur mère représentait la Fée souveraine (1).

La grâce etles charmes de cette aimable actrice ont été souvent célébrés par les poètes de son temps. Elle avait, notamment, inspiré à Fabre d’Eglantine la romance le Délire d'Amour, un des triomphes du chanteur Garat, et où se trouve ce joli couplet :

En ville, aux champs, chez moi, dehors, Ta douce image est caressée :

Elle se fond, quand je m’endors,

Avec ma dernière pensée.

Quand je m’éveille je te voi - Avant d’avoir vu la lumière,

Et mon cœur est plus vite à toi

Que le jour n’est à ma paupière.

{) La première représentation de cette pièce remontait au 22 mars 1740; elle avait été jouée 22 fois de suite. C’est à l’occasion de l’Oracle, que l'omnipotence souvent dédaigneuse et blessante de certains comédiens à l'égard les auteurs trouva un rude adversaire dans Saint-Foix. Le rôle de la Fée avait été confié par lui à M'° Lamotte. Ayant à se plamdre de ses emportements à une répétition, il lui arracha sa baguette : « J'ai besoin d’une fée, dit-il, non d’une sorcière. » Et comme elle voulait récriminer, il lui ferma la bouche par ces mots : « Vous n'avez pas de voix ici, nous sommes au théâtre, et non au sabbat. »

_—_ C'est dans l’Oracle que Léon Battu a puisé le sujet de l’opéra-bouffe : Les Pantins de Violette, musique d’Ad. Adam, représenté aux Bouffes-Parisiens, le 29 avril 1856, et ayant Mie Schneider pour interprète du petit personnage substitué à Alcindor. Plusieurs passages de la pièce de Saint-Foix sont même textuellement reproduits dans cet opéra-bouffe.