Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

142 LES CAHIERS DES CURÉS

En Dauphiné mème, les quelques aristocrates obslinés qui n'ont pas osé résister au patriotique embrassement des trois Ordres élèvent la voix. Une suprême tentative pour rompre l'unanimité de Vizille est faite aux États de Romaus. « Un bas courtisan, perdu de dettes » — comme le définissent les curés dauphinois (1), l'archevêque d'Embrun, s'écrie : « Vous dédaignez de m'entendre, vous, prélats, et vous, gentilshommes, assemblés ici. Un funeste bandeau dérobe à vos veux l'abime où vont s'engloutir la noblesse et le clergé. Ecoutez encore ces derniers mots: Mon génie prophétise ! Les deux premiers ordres sont foutus! » A quoi réplique le comte de la Blache : « Monseigneur, vous venez de haranguer en dragon; je vais opiner en prélat. » Et à l'appel de ce gentilhomme l'assemblée confirme définilivement les Arrètés libérateurs ct égalitaires.

Mais il n'en va pas de mème dansles provinces de Béarn, de Navarre et de Bretagne qui avaient disputé au Dauphiné la glorieuse initiative de la résistance aux attentats du ministère Brienne.

Les vieux États de Navarre, révolutionnairement ressus= cités, protestent contre le Résultatduw conseil. Is réclament leur convocation régulière pour procéder, en réunion générale et non par baillage ou sénéchaussée, à la nomination des représentants aux États-Généraux. Ils dénient aux curés le droit de nommer des délégués, prétextant que l'épiscopat béarnais représente le clergé local tout entier.

Au sein des États de Bretagne a éclaté un conflit entre le Tiers, qui réclame l'égalité de représentalion, le vote par tête, la répartition proportionnelle des impôts sans distinetion d'ordre, et les privilégiés, aristocrates et cléricaux, qui, après avoir résisté au despotisme ministériel, préten-

(1) Page 9-10 de leur Leftre aux recteurs de Bretagne, que nous unalysons plus loin,