Les hommes de la Révolution

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mille; petit employé, il se courbait sur son pupitre, Comme tant d’autres, il aurait pu maintes fois, avec quelques flatteries, obtenir des faveurs et la fortune. Il préféra demeurer pauvre et fidèle à ses idées (1). Accusé de méfaits imaginaires, jeté en prison, menacé sans cesse par d'innombrables ennemis, il ne céda pas une parcelle de ses conceptions, ne fit pas un pas en arrière. Au moment où il dirigeait le directoire secret et où, la conspiration triomphant, il allait devenir l’un des maîtres des destinées populaires, il était comme toujours dans la misère. Toute la vie de Babeuf tient dans ce mot: Misèrel La misère pour lui, la misère pour les siens et, au bout de ce calvaire, la mort, à Vendôme.

Babeuf était doué d'une rare sensibilité. On le voit, dans ses premières lettres, déplorer les excès révolutionnaires. Plus tard, ses attaques contre les terroristes et contre Robespierre lui

(1) Son fils Emile raconte qu'on lui proposat, en échange de sa conscience et de sa plume, le ministère des finances. Il refusa avec indignation,

À propos des fils de Babeuf, il nous faut dire quelques mots. Le même Emile chercha le traître Grisel pendant plusieurs années et finit par le tuer dans un duel, où lui-même fut dangereusement blessé. Il mourut laissant un fils qui fut sous-préfet en 1848 et qui fut le dernier du nom. Ce dernier des Babeuf avait entrepris une Biographie contemporaine qui ne réussit point et pour laquelle il avait demandé un prospectus à Charles Nodier.

Un autre fils de Babeuf, Camille, prit d'une sorte de délire patriotique se jeta du haut de la colonne Vendôme, lors de l’arrivée des cosaques à Paris, en 1815.

Le troisième, Caïus, fut tué, à 18 ans, lors de l'invasion.