Louis XVI et la Révolution

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s’attendrissaient à lui voir si bel appétit. Le comte d’Iézecques se rappelle avec émotion l'attitude de Louis XVI à table : « Le Roi dinait tous les dimanches en public : le Roi y mangeait, si je puis me servir de cette expression, avec toute la franchise de son caractère. Son tempérament sain et vigoureux, soutenu par un exercice continu, lui donnait un appétit qu'il satisfaisait avec une bonne humeur qui faisait plaisir à voir. » Pour les ennemis, ce bel appétit était de la boulimie : le rédacteur des Tableaux de la Révolution francaise, à la date du 10 août, dit ceci : « Notre devoir d'historien nous oblige à apprendre à la postérité que Louis XVI mangea pour 300 livres de pêches pendant le combat, et que, peu de temps après, assis tranquillement à table dans un des comités de l'assemblée, il dinait avec sa voracilé ordinaire. » Le récit étant de l’an XI, le témoignage peut être doublement suspecté, vu sa date : il indique tout au moins qu’une légende peu flatteuse s'était formée sur ce royal appétit. À coup sûr, Louis XVI avait des indigestions formidables, quand il était dauphin, et prenait des soins minutieux pour sa santé. Il aime à parler de ses médications, même dans les moments tragiques : le 10 juillet 1790, il écrit à Ja duchesse de Polignac : « Dans cette quinzaine, nous sommes trois qui nous soyons purgés : cela chasse les humeurs, qui ne s’amassent que trop aisément, par le temps qui court. » Ces purgations lui étaient nécessaires, vu son régime; voici le menu d’un de ses déjeuners habituels, au saut du lit : quatre côtelettes, un poulet gras, six œufs au jus, une tranche de jambon, le tout arrosé d’une bouteille et demie de champagne. Avec un pareil ordinaire, on constate chez Louis XVI une tendance à l’assoupissement quelquefois inopportune. Un jour que le roi de Suède lui racontait ses voyages, le Roi se met à bâiller plusieurs fois coup sur coup : Ah mon Dieu! s’écrie Gustave IIT piqué, je vous demande pardon; j'ai le défaut de tous les voyageurs d'entretenir et d’ennuyer de tout ce qu'ils ont vu ceux qui n’ont rien vu. Une autre fois, au