Marie-Antoinette, Fersen et Barnave : leur correspondance

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j'arrive au seul but auquel tous nous devons tendre, qui est le bien général et le bonheur de tous, ceux-là même qui auront le plus crié, seront obligés de dire que j'ai mis, à moi seule, plus de constance et de courage à atteindre ce but, que les autres. C’est cette justice que j'attends de l'avenir qui me fait supporter toutes mes peines. Ceux qui refuseront de me la rendre, je les méprise trop pour m'en préoccuper. Pardon de la dureté de ces expressions, mais je parle à un ami, qui, à ce titre mème, me doit de l’indulgence. » Il y a un article de votre lettre dont j'aurais tort de ne pas parler, car il m’affecte réellement. Cest la manière dont vous avez jugé les deux lettres de votre frère. Vous connaissez son cœur et son âme tout entière. Il n’est pas désuni avec vous, mais il voit sa position tout entière, telle qu’elle est. S'il a été obligé de vous refuser ce n’est pas par méfiance mais c’est par prudence. Ses actions ne sont pas sans motifs. Que de fois, étant ensemble, vous et moi, ne nous sommes-nous pas dit que ce n’est que lui qui peut juger ce qui est possible ou non. Ceux qui vous disent le contraire vous trompent et ne cherchent qu’à nous désunir. Votre frère vous écrit, je n’ai donc rien à ajouter à cette lettre déjà si longue. »

On sent bien à la lecture de cette lettre l'émotion, l'indignation mème que commence déjà à inspirer à Marie-Antoinette la conduite des frères du roi. C'était