Mémoire sur la Bastille

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neur, d’autres, dans l’une des cours de la Bastille, s'emparent d’une jeune personne intéressante par sa grâce et sa candeur. L’ayant amenée auprès du premier pont: « C’est la fille de de Launey, s’écrient-ils; qu’il rende la place, sinon qu'il voie expirer sa fille dans les flammes. » Et l’on allume une paillasse sur laquelle elle étoit évanouie. Le père de Mile de Monsigny, c’est le nom de la jeune personne, la voit du haut des tours, près d’être brûlée vivante. Il alloit se précipiter, lorsqu’il fut atteint et renversé par deux coups de feu. Le ‘brave et généreux Aubin Bonnemère, qui avoit déjà une première fois sauvé la fille de cet officier, écarte la foule homicide, enlève Mlle de Monsigny, la remet en mains sûres, et revole au combat.

Un sabre lui fut apporté dans notre salle, Le 3 février 1790, par celle qu’il avoit délivrée, et nous y joignimes la couronne civique. C’est ainsi que les atrocités finissoient le plus souvent par des traits d’héroïsmer,

1. Le couronnement du citoyen qui avoit sauvé Mlle de Monsigny n'eut lieu que le 5 février, à la séance du soir. Ce fut, de part et d’autre, le triomphe de la reconnoissance et de la modestie. La couronne fut offerte par monsieur le maire à M1le de Monsigny pour lui procurer le plaisir de la poser elle-même sur la tête de son libérateur. « Quant au Sabre, je crois, dit M. Bailly à M. Bonnemère, ajouter à