Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

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mais un bon dialecticien détruirait sans peine l'effet de ces bagatelles harmonieuses, nugæ canoræ. ». Plus loin Naigeon dit encore de Voltaire, auquel il en veut pour lui avoir gâté son curé Meslier: « Je sais que le dogme de l'existence de Dieu, pour lequel il a combattu toute sa vie avec lemême zèle, ne se lie pas bien avec d'autres opinions, qu'il a constamment soutenues, telles que la matérialité de l'âme , la nécessité des actions humaines et l'éternité de la matière.

. : . Mais Voltaire n’en est pas moins d'accord avec luimême; car il ne faut pas croire que, quand il plaide avec tant d'intérêt la cause de Dieu, ce soit sa propre opinion qu'il défend; il suffit de bien prendre l'esprit de toutce qu'il a écrit sur cette matière, pour se convaincre qu’il parle bien moins de l’existence de Dieu, comme d'un dogme, dont la vérité lui est démontrée, que comme d'un dogme utile et nécessaire. » Il y a de la justesse dans cette observation de Naigeon et il faut convenir que le Dieu rémunérateur et vengeur, en rapport avec des âmes , dont on met pour le moins en doute la spiritualité et limmortalité, est un Dieu assez vain. Mais d'autre part, il serait injuste de ne pas reconnaître que Voltaire parle de l'existence, il est vrai, plus que des attributs de Dieu, d’un ton, d'un accent , et avec des raisons qui ne permettent guère de suspecter , sinon la parfaite constance, du moins la sincérité de son sentiment et de sa conviction; son cœur, si ce n’est sa logique, est pour le Dieu qu'il confesse.

Mais Naigeon est d’une exactitude en matière d’athéisme , qui le rend peu complaisant à quiconque ne partage pas parfaitement toute sa foi et y porte quelque réserve où quelque hésitation.