Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

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de Dumarsais et de Diderot, qu'on peut même regarder à cet égard comme le dernier des Romains, on en trouve dix de la force de l'abbé de Condillac et de d’Alembert.

Sans doute il n'y à point de philosophie sans raison, c'est même la condition sine qud non; mais il peut y avoir de a raison sans philosophie ; en ce sens précis et rigoureux, Fontenelle, Dumarsais, Helvétius, Diderot, sont de vrais philosophes, et l'abbé Condillac et d' Alembert sont seulement des métaphysiciens très-circonspects, très-sages, qui ont écrit sur la philosophie, souvent avec justesse, toujours avec ordre et clarté, mais presque partout avec peu de philosophie, et qui doivent être comptés plutôt parmi les beaux esprits que parmi les grands esprits. » Mais que va-t-il dire de Diderot, le dernier des Romains, comme il l'appelle, qui à écrit, il ne sait comment, à l'article vigilance, qu'il ne manquait à Socrate que de croire en Jésus-Christ ? Il s'en tirera par la distinction de la doctrine publique et de la doctrine secrète, ou de la doctrine ironique et de la doctrine sérieuse: « Ceux qui ont connu Diderot, dit-il, sentiront bien qu’il ne parlait ainsi que par ironie. » Et il rapporte, pour le prouver, des paroles de lui, qui en effet le démontrent si explicitement, qu'il serait même difficile de les citer; j'en laisse le soin comme la responsabilité à Naigeon, qui seul peut ainsi justifier son maître du péché de flatterie, ou de respect, il est vrai, quelque peu ironique à l'égard du christianisme. Il y met toute sa fidélité et peut-être même un peu plus.

Quel dossier à dépouiller, que celui de notre auteur, et quelles pièces à en tirer, quand on veutsuivre d'un peu près l'espèce d'instruction à laquelle il donne lieu. Heureusement pour nous que ce: procès avance, et qu'une ou deux de ses