Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

= 65 vers tout entier; voilà ce que Naigeon propose au nom de Diderot, accepte et soutient au vice, sans restriction ni réserve ; c'est, je pense, un assez clair et assez franc matérialisme. Sur l’athéisme, il est peut-être plus net et plus explicite encore; il l’a surtout en particulière vénération et il lui trouve des mérites pour la conduite de là vie, qu'il ne reconnaît à aucune autre doctrine, sans excepter, bien entendu, le christianisme lui-même. Il faut lui entendre dire, à propos de Diderot, comment les règles, d'après lesquelles l’athée se dirige dans ces routes obscures et périlleuses de la vie, et prononce en soi-même sur la moralité et l'immoralité de ses actes, ne sont pas seulement plus sévères, plusefficaces, que celles qui déterminent en général la conduite du chrétien; mais même comment dans l'accès, si dangereux des passions, qui portent le trouble et le désordre dans les fonctions vitales et intellectuelles, ces règles sont encore pour l’athée un frein plus puissant que tous ces motifs, empruntés à la religion. « Pour le chrétien en effet, dit-il encore, il n'y à point de fautes inexpiables; il n’en est pas de même pour l’athée ; à quel tribunal, à quel juge pourrait-il avoir recours pour se faire absoudre? Il n’en connaît pas d’autres que sa conscience, et celle-ci est inexorable, incorruptible, et n’absout jamais, à moins toutefois, fait naïvement observer Naigeon, qu’on ne l’assoupisse, qu'on n'étouffe leremords, en portant le mal à l'excès, c'est-à-dire en devenant le plus vil, le plus misérable, le plus dépravé des hommes ; un être pour lequel il n’y à plus ni vice ni vertu. » — Ainsi pense notre auteur, sans se rappeler ce qu'il a luimême avoué, ce qu'il a déduit ailleurs comme conséquence

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