Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques
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entendu de lui plus haut, dans différentes circonstances ; les événements y-ont fait quelque chose.
J'arrive enfin à l'introduction placée à la tête de l'édition de Montaigne et publiée en 1802.
Naigeon qui déjà, dans ce qu’on vient de lire de lui, semble s'être résigné à une modération de langage, qu'il n’a pas toujours eue, paraît être entré désormais dans les voies de la prudence, au point même qu'il fut fort mécontent, quand il se vit mis dans le Dictionnaire des athées, par Sylvain Maréchal et Delalande. Nous ne nous étonnerons donc pas qu’il ait consenti d'abord à l’apposition de cartons dans son introduction de Montaigne et même plus tard à suppression de tout ce morceau dans la plupart des exemplaires : les temps et les circonstances nous en donnent la raison.
En parlant des sentiments religieux de Montaigne, Naigeon dit: «Les uns l'ont regardé comme un bon et fidèle croyant; les autres l'ont rangé dans la catégorie des athées ; comme tel ils l'ont accusé de libertinage, car dans l'opinion des théologiens, ceux qui nient la révélation et qui ne voient dans le système chrétien qu'une mauvaise fable, sont nécessairement des hommes sans mœurs et sans probité ; ils sont même si persuadés de l'utilité et de la nécessité de la religion, pour servir de base à la morale, que selon eux, celui qui aurait été jusque-là honnête homme, cesserait de l'être, et dirait comme Brutus: vertu, tu n'es qu'un vain nom, s’il venait à se convaincre que l'immortalité n’est qu'une chimère et le rêve de la vanité jeté à l'ignorance. » Il tient donc qu'il n'y a pas grand mal à être athée et que Montaigne le fûtil, il n'y aurait pas à lui en faire un crime; il tient,