Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales
DE LA BATAILLE D'IÉNA AU TRAITÉ DE TILSITT. xxxx
droit de se considérer comme tel. Le 11 décembre 1806, il présenta au corps législatif une loi portant création d’un ordre de l’Union et d’un ordre du Mérite, celui-ci spécialement destiné à récompenser les services militaires. Le 7 du même mois, il instituait les grands officiers du royaume, maréchaux et colonels-généraux, à limitation de ce qui s'était fait en France (1). On peut dire que, dans cette circonstance, Louis fut assez mal inspiré. La création d’un ordre n’avait rien que de conforme aux usages des États monarchiques ; mais elle était prématurée, et il eût été convenable d'attendre tout au moins que les grandes puissances eussent reconnu le nouveau royaume. Quant à l'institution des maréchaux, elle était absolument disproportionnée à l'importance militaire du pays, et on ne saurait nier que les railleries qu’elle excita en France ne fussent en partie méritées. Le blâme de Napoléon ne se fit pas attendre. Le 2 janvier 1807, il lui écrivait de Varsovie qu’il avait eu tort de créer des maréchaux, que cela avait l'inconvénient de dépenser beaucoup d'argent et de donner bien des prétentions à des hommes qui avaient fait peu de chose. « Croyez-vous qu’un général de division français voudrait être commandé par un maréchal hollandais? Vous singez l'organisation de la France, quand vous vous trouvez dans des circonstances très-différentes. Commencez donc par établir une conscription et avoir une armée (2). » Dans une autre lettre envoyée quelques jours après, il blâmait, avec non moins de vivacité, l'institution des ordres. « Vous ne vous contentez pas de créer un ordre, vous en faites deux. Il fallait attendre l’occasion de votre couronnement pour leur donner une époque et une forme imposantes. Si vous n’y avez pas nommé, lais-
(1) Docum. histor., t. I, p. 300. (2) Napoléon à Louis, 2 janvier 1807, p. 90.