Oeuvres diverses
— XIV —
la postérité : « Sauvons la France, et que notre nom soit maudit. » Tel fut leur cri sublime.
Notre époque semble prendre à tâche d'aecomplir ce souhait stoïque. Allons! poètes, romanciers, historiens, vengeurs des cassettes royales, à l’œuvre! à la curée! Il faut retourner le poignard dans ces cœurs exécrés, traîner les Corps à l'égout comme s'ils sortaient du Panthéon, déchirer à belles dents les dévouements et les enthousiasmes, Muse de galanteries royales, Piéride de Versailles et de Trianon, voici un sujet digne de ta lyre, chante le crime patricien, glorifie son cortége d’odieuses circonstances, même cet appel aux sentiments du cœur, hommage involontaire arraché à l'assassin, moyen sûr d'arriver au monstre Marat.
L'élève des jésuites girondins, grandie à l'ombre d'un couvent, est jeune, belle, le profil un peu dur, la narine et la lèvre frémissantes : elle trône sur le corps de Marat comme l'aristocratie provocante et railleuse sur le cadavre souillé du peuple. Au milieu des nuages d'hymnes et d encens, l’ange de l'assassinat foule du pied les multitudes égorgées.
Qu'’y a-t-il en fin de compte dans le coup de tête tragique de la petite-fille du grand Corneille ? La haïne à la plèbe,
Enfantillage et gloriole, répulsion instinctive des femmes, des chiens et des esclaves pour les haïllons du pauvre, délicatesse nerveuse surexcitée par les orgueilleux préjugés du patriciat, tout le côté bas et méprisant de son sexe, voilà Charlotte Corday.
Fouillez les paroles, les lettres, les actes de cette triste héroïne. des phrases, nulle idée, pas de cœur. C’est la vertu ostentatrice et parlière dont nous entretient Montaigne, la vertu des castes qui