Oeuvres diverses

1 Éfet

dans cette attitude qu’on l'aime; mais elle vous a joué un mauvais tour, messieurs de l’oraison funèbre. Elle a broyé ses ennemis, et, bien que déchirée par vos mensonges, elle vit encore dans l’histoire.

Chantres doucereux du martyre, qu’on sent bien le poison de vos paroles! Vantez la gloire des torturés, le bonheur des suppliciés ; ressassez les recommandations du Christ et de saint Pierre. « Souffrir est plus beau que punir, » n'est-il pas vrai? Allons! couronnez de Îleurs la victime qu’on mène à l'autel.

Sanguis maréyrum, semen martyrum ! Sang des martyrs, Semence de martyrs! — Béate ironie !

La bravade de Tertullien ricane d’une façon sinistre sur le corps d'Hypatia, aux lueurs des büchers et de la Saint-Barthélemy. Où sont ces milliers de sectes si vigoureusement argumentées par le fer et le feu? La foi des Dominique refleurit sur le sol arrosé du sang des sectaires ; les pays les plus persécutés pour hérésie sont devenus les plus orthodoxes, toujours en vertu de l'axiome : Sanguis martyrum…

Quel scandale ! la matière étranglable à merci se révolte contre ses légitimes tortureurs. L’ilote mord la main qui le frappe. Débauche d’orgueil ! le martyr sort de l’état sublime de résignation pour se plonger dans la vengeance : il dédaigne la tirade posthume des poètes et des rhéteurs.

Si, fermant les yeux aux souffrances populaires, les hommes qu’on veut salir de boue et de sang avaient aspiré à longs traits l’opium philosophique; si, repoussant du pied la femme et l'enfant en guenilles, ils s'étaient réfugiés dans les temples d’abstraction avec des filles célestes; s'ils n’eussent témoigné qu’une haine platonique contre l’immoralité, et que d’héroiques poissardes, montées sur des canons, n’eussent pas été chercher le roi et la reine à Versailles, le moyen àge relevait la tête, et nos adversaires d'aujourd'hui