Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA GIRONDE. 183

parade, un homme comme moi n'aurait jamais eu l’idée de bâtonner ainsi un maître des requêtes. » Et il fallut bien que celui-ci étouffät sa vengeance et son dépit.

Brissot vit chez Nolleau un abbé Coyer que Voltaire avait reçu à Ferney, ct comme cet abbé annonçait le projet d'y séjourner plusieurs semaines : « Il ne paraît pas, dit Voltaire, que vous veuilliez ressembler à dun Quichotte; il prenait les auberges pour des châteaux et vous prenez les châteaux pour des auberges ». Un autre ami de Nolleau était le curé de Sainte-Geneviève, qui fit celte réponse à ceux qui, après l’agonie de Louis XV, le plaisantaient d’avoir inutilement découvert la châsse de sa sainte et invoqué les secours du ciel : « Eh! de quoi vous plaignez-vous ? Est-ce qu'il n’est pas mort ? »

Linguet, que Brissot finit par accuser de grimacer la liberté, fut longtemps son ami, son conseiller, son modèle. Vers 1719, comme il lui parlait de ses travaux littéraires, de ses projets. Quel âge avez-vous ? interroge Linguet. — Vingt-six ans ! — Heureux mortel ! Vingtsix ans ! Ef à la veille de tout ce qui se prépare! Linguet semblait entrevoir la Révolution.— Marat, dans

1. Pendant une répétition générale de la Charlotte Corday de Ponsard, M. Alexandre Dumas fils, l'immortel auteur de deux chefs-d’œuvre du théâtre moderne, le Demi-Monde et le Père prodigue, improvisa ce plaisant distique :

Ainsi péril Marat. O terrible vengeance! Pour un bain qu'il a pris, il n’a pas eu de chance.