Orateurs et tribuns 1789-1794

186 ORATEURS ET TRIBUNS.

— Cet excellent vin que je vous ai fait boire, je le tenais de Déoda, fameuse impure, qui craignait que je ne révélasse un rendez-vous nocturne contraire à son marché et une grossesse qu’on cache avec soin.» En sortant de là, Brissot crut s'échapper d’une caverne de voleurs.

Vers 1785. il se lie avec Bergasse, qui « en élevant un autel au magnétisme, prétendait n'avoir en vue que d’en ériger un à la liberté ». Vouloir opérer ouvertement la Révolution, c'est vouloir échouer; il faut, pour réussir, s’envelopper de mystère : ainsi pensait Bergasse. Sa manie était de se croire un Lycurgue : il ne cherchait que des adorateurs, et les succès de Mesmer, de Cagliostro l’empêchaient de dormir. Quelques femmes d'esprit, plus amoureuses de sa réputation que de lui, les partisans du magnétisme qui l’encensaient comme un Grand-Lama, augmentaient son extravagance. D'ailleurs, il eut des qualités publiques et privées, il haïssait le despotisme, mais haïr le despotisme n'est pas toujours aimer la liberté, observe Brissot, qui convient d’ailleurs que les efforts de Bergasse et de ses amis hâtèrent la Révolution : « C’est de ce foyer que partirent presque fous les écrits publiés en 1788 et 1789 contre le ministère. »

Le marquis du Crest, chancelier du duc d'Orléans, homme d'esprit actif, novateur, mais présomptueux. commit la folie d'écrire au roi une lettre où il confessait naïvement qu'il était le seul homme capable de