Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA GIRONDE. 201

point, et il dirait volontiers avec Helvétius qu'il n’est pas plus étonnant que les hommes fassent et disent des sottises, qu'il ne l’est qu'un poirier porte des poires. Barère, un de ses proscripteurs, lui rend hommage en ces termes : « Depuis Socrate, il n’y eut pas de philosophe plus bienfaisant, plus tolérant, plus ami de l'humanité, plus protecteur de ses droits. » Quant à Dumont, il avoue qu'il avait une haute idée de Condo reet et lui pardonne presque d’avoir voulu une république faite par l’Assemblée pour n’en avoir pas une faite par la populace. Il constate d’ailleurs que sa société a été le foyer de la République et que la cour n'avait pas de plus grand ennemi, ses attaques étant d'autant plus dangereuses qu’elles restaient dans ies bornes de la finesse et de la bienséance.

« Condorcet, conclut Sainte-Beuve, avait, je l'accorde, la passion et la religion du genre humain ; cela ne suffit pas. Il devait ne pas imiter ces grands prêtres et ne pas se dévouer à faire prévaloir sa religion aux dépens de la justice. » |

On sait les calomnies des pamphlétaires, de Marchant dans la Jacobinéide, les invectives de Marat, de Robespierre, les paroles d’exécration de Malesherbes. « Condorcet n’est pas sans mérite, écrit madame Roland, mais c’est un intrigant: on peut dire de l'intelligence de Condorcet en rapport avec sa personne, que c'est une liqueur fine imbibée dans du coton. »—« Condorcet, homme né pour la gloire et le bien de son pays, si