Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA GIRONDE. 203

tions trop morcelées sont une prime à l’intrigue et à la médiocrité. Oui, ce jour-là, il eut le droit de s’appliquer ce distique qu'il croyait sans doute être le symbole de sa vie entière :

Ils m'ont dit : choisis d'être oppresseur ou victime,

J'embrassai le malheur et leur laissai le crime.

Et en effet, Chabot lut cette lettre à la Convention, proposa la mise en arrestation de celui qui l'avait autrefois défendu, de l'homme qui avait l’audace de prétendre que son projet valait mieux que l’œure sublime imposée par les Jacobins à l’Assemblée!

« Connaissez-vous, disait Diannyère à Condorcet, les détails de la brouillerie de Diderot et de Rousseau? Non, mais Diderot était le meilleur des hommes, et quand on se brouillait avec lui, on avait toujours tort. — Mais vous? — J'avais tort. » Personne plus aisément ne souffrait la contradiction, n'avouait ses torts avec plus de franchise. De même, il n'hésite pas à sacrifier au progrès les avantages qu’il tient de son rang, de sa naissance : désintéressement assez peu commun si j'en juge par le mot de ce riche fermier général : « Pourquoi donc changer, monsieur, est-ce que nous ne sommes pas bien? »

Mais voici l’envers de la médaille : cette amertume de plaisanterie qui plus tard se condense en sophismes logiques, en violences froides, en apologies systéma-